mardi 8 janvier 2008

L’interdiction de manger avant de nourrir son animal

L’interdiction de manger avant de nourrir son animal

Question

A-t-on le droit de manger avant d’avoir nourri son animal ?

Décision de la Hala’ha

Il est interdit de manger avant de nourrir son animal. Cette interdiction inclue même le fait de goûter un aliment. Par contre, en ce qui concerne la boisson, l’être humain est prioritaire sur l’animal, à condition que cela n’entraîne pas de souffrance pour l’animal.

Sources et développement

Il est enseigné dans la Gmara Bra’hot (40a) :

Rav Yehouda dit au nom de Rav : Il est interdit de manger avant d’avoir nourri son animal, comme il est dit : « Je procurerais l’herbe de ton champs pour ta bête, tu mangeras et tu te rassasieras. » (Devarim 11)

Nous constatons dans ce verset que la Torah a donné priorité à l’alimentation de l’animal sur celle de l’homme (au contraire de ce que l’on pourrait croire), c’est pourquoi, il est interdit de manger avant de donner à manger à son animal.

Cette Hala’ha est tranchée par le RaMBaM [DP1] et tous les Poskim (les décisionnaires).

Il est évident qu’il n’y a aucune différence sur ce point entre une bête de bétail et un volatile, dans tous les cas, il faut d’abord donner à manger à son animal, et ensuite, on est autorisé à manger.

Le Touré Zahav (ou TaZ) [DP2] écrit (sur Shoul’han ‘Arou’h Ora’h ‘Haïm chap.167, note 7) qu’il n’y a pas d’interdiction de goûter un aliment, mais uniquement de faire une vraie consommation, avant d’avoir donner à manger à son animal. Il fait remarquer cette nuance à travers les termes précis employés dans la Gmara Bra’hot citée plus haut : « Il est interdit de manger… », goûter est donc permis.

Cependant, notre maître le ‘HYDA [DP3] , dans son livre Birké Yossef (sur Sh.’A O.’H 167, note 5), s’étonne de cette opinion du TaZ, car – selon le ‘HYDA – la version du RIF[DP4] et du ROSH [DP5] de cette Gmara Bra’hot (40a) est « Il est interdit de goûter… ». Cette version est aussi celle de nombreux autres Rishonim (décisionnaires de l’époque médiévale)

En réalité, c’est également la version rapportée dans une autre Gmara, la Gmara Guitin (62a), où il est écrit qu’il est interdit de « goûter » avant de donner à manger à son animal.

Par conséquent, il est interdit de goûter un aliment avant d’avoir donner à manger à son aliment.

C’est ainsi que tranche notre maître le Rav Ovadia YOSSEF shalita, dans son livre Hali’hot ‘Olam (page 352).

Le Sefer Ha’hassidim [DP6] écrit que pour ce qui est de boire, l’être humain est prioritaire sur l’animal, et il est donc permis de boire avant de donner à manger à son animal. Nous apprenons cela de divers versets de la Torah :

§ Lorsque Moshé Rabbenou doit fournir de l’eau aux Bné Israël dans le désert. « Tu abreuveras l’assemblée et leurs troupeaux » (Bamidbar 20)

§ Lorsque Rivka donne à boire à Eli’ezer et à ses chameaux. « Bois, et je donnerais également à boire à tes chameaux » (Bereshit 24)

Ce qui n’est pas le cas pour la nourriture, pour laquelle il est écrit au sujet de Eli’ezer :

« Il donna de la paille et du foin à ses chameaux » et ensuite il est écrit : « On placa à manger devant lui » (Bereshit 24).

C’est pourquoi, il est interdit de goûter quoi que ce soit avant d’avoir donné à manger aux animaux qui sont sous notre responsabilité. Mais pour ce qui est de boire, il est permis de boire avant de leur donner à manger.

Mais ceci à une condition :

Que les animaux ne souffrent du fait que l’on boit avant de leur donner à manger.

En effet, si des animaux souffrent du fait qu’on ne leur donne pas à manger, on transgresse un interdit très grave de la Torah (Tsa’ar Ba’alé ‘Haïm).

C’est l’occasion de rappeler aux personnes qui possèdent des animaux sous leurs responsabilité, qu’ils doivent veiller à ne pas leur causer la moindre souffrance, que ce soit par privation de nourriture ou de boisson, ou bien du fait des conditions dans lesquels ces animaux sont entretenus.

La faute de Tsa’ar Ba’alé ‘Haïm (faire souffrir des animaux) est très grave, et Hashem est plein de pitié envers ses créatures. Il est aussi à l’écoute des plaintes des animaux, et peut infliger un dur châtiment à l’homme pour avoir fait souffrir des animaux.

Notre maître le saint Ari Zal [DP7] a dit un jour à une femme, que la raison pour laquelle elle n’avait pas d’enfants était parce qu’un jour, les poulets qu’elle possédait avaient du mal à se procurer de l’eau pour boire.

C’est pour cela que de nombreux Grands Maîtres de la Torah – parmi eux l’auteur du Pélé Yo’ets [DP8] – nous ont toujours mis en garde de ne jamais s’introduire dans ces situations, et il n’est donc pas souhaitable de posséder des animaux, lorsqu’on n’est pas certain de pouvoir s’en occuper de façon à ce qu’ils ne souffrent jamais.

Principalement avec des poussins, qui – du fait de leur fragilité – sont susceptibles de souffrir plus facilement.

Rédigé et adapté par R. David A. PITOUN France 5768

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[DP1]RaMBaM ou Maïmonide Rabbi Moshé Ben Maïmon Espagne – Egypte 12ème siècle

[DP2]TaZ ou Touré Zahav Rabbi David SEGUEL HaLevi Pologne 17ème siècle

[DP3]HYDA Rabbi Haïm Yossef David AZOULAÏ Israël - Italie 18ème siècle

[DP4]RIF Rabbi Its’hak EL FASSI Algérie – Maroc 10ème siècle

[DP5]Rosh Rabbenou Asher Allemagne-Espagne 13ème siècle

[DP6]Sefer Ha’hassidim Rabbi Yehouda He ‘Hassid Allemagne 12ème siècle

[DP7]ARI zal Rabbi Its’hak LOURIA AHKENAZI, Israël 16ème siècle, principal commentateur mystique de la Torah

[DP8]Hessed Lealafim Rabbi Eli’ezer PAPO , auteur du célèbre Pélé Yo’ets. Rav de la ville de Silistra en Yougoslavie 19ème siècle

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