La ‘Aliya et le respect des parents
QUESTION
Une personne qui habite en Israël et dont les parents - qui vivent en dehors d’Israël - lui demandent de venir les rejoindre pour vivre à leurs côtés en dehors d’Israël, cette personne est-elle tenue d’obéir à ses parents sur ce point à titre de la Mitsva de respecter ses parents, ou pas ?
DECISION DE LA HALA’HA
Selon les Poskim, la Mitsva d’habiter en Israël reste une ordonnance de la Torah même de notre époque. Elle équivaut à toutes les Mitsvot.
Une personne qui habite en Israël n’a pas le droit de quitter Israël même pour aller vivre à proximité de ses parents. Malgré tout, s’il s’agit d’une courte visite, il est permis de quitter Israël pour aller accomplir la Mitsva de respecter ses parents.
Cependant, il faut quand même préciser que cette question se présente parfois sous différents aspects, et nécessite l’avis d’un Rav compétent dans ce domaine pour chaque cas de façon indépendante. Par exemple, lorsque la chose peut provoquer un éloignement au sein de l’ensemble des membres de la famille, et aussi à l’éloignement de la Torah et des Mitsvot lorsque celui qui habite Israël est le chef spirituel de la famille, et dans ces cas-là, il est peut être envisageable de quitter Israël pour une cause aussi importante, de laquelle dépendent de nombreux principes fondamentaux de la Torah. « Celui qui écoute le conseil est sage » (Mishlé 12-15).
SOURCES ET DEVELOPPEMENT
Nos maîtres enseignent dans le Midrash Sifré (Parasha de Réeh) :
Un jour, Rabbi Yehouda Ben Betera, Rabbi Matya Ben ‘Harash et Rabbi ‘Hanina le neveu de Rabbi Yehoshoua’ voyageaient d’Israël vers l’étranger. Lorsqu’ils arrivèrent à la frontière d’Israël, ils levèrent les yeux et versèrent des larmes en déchirant leurs vêtements et en citant le verset : « Vous hériterez de la terre et vous vous y installerez » qui est lui-même suivi d’un autre verset : « Vous observerez afin d’accomplir toutes les lois et tous les jugements ». Ceci afin de t’apprendre que la Mitsva d’habiter en Israël équivaut à toutes les Mitsvot ». Et ils rebroussèrent chemin.
Le RAMBAN écrit dans son Sefer Ha-Mitsvot que la Mitsva d’habiter en Israël reste une ordonnance de la Torah même de notre époque. Le RASHBATS – dans une Tshouva (chap.280) - ainsi que la majorité des décisionnaires approuvent cette opinion. Telle est également l’opinion du RAMBAM comme il l’exprime à plusieurs reprises : dans son ouvrage Yad Ha-‘Hazaka (chap.13 des Hal. relatives au mariage ; chap.8 des Hal. relatives aux serviteurs Hal. 9), ainsi que dans une Tshouva (chap.180).
Le Maharam de ROTTENBOURG tranche dans une Tshouva (édition de Berlin Sha’ar 2 chap.28) qu’un fils ne doit pas écouter son père s’il lui ordonne de ne pas émigrer en Israël, car habiter en Israël est une Mitsva. Or, nos maîtres ont par ailleurs commenté un verset dans la Guemara Yebamot (5b) : « Chacun doit craindre sa mère et son père, et vous respecterez mes Shabbatot, Je suis Hashem. » Vous êtes tous soumis à mon respect. Ce qui signifie que si la Mitsva de craindre le père et la mère est suivie immédiatement des termes « Je suis Hashem », c’est pour nous indiquer que chacun est soumis au devoir de respecter Hashem. C’est pourquoi, chaque fois qu’il s’agit d’une Mitsva, on ne doit pas écouter le père, car le respect d’Hashem prime.
Il semble que le Maharam de ROTTENBOURG partage l’avis du RAMBAM (chap.6 des Hal. relatives aux Mamrim) selon qui même si le père ordonne au fils de transgresser seulement un interdit Miderabbanan (décret de nos maîtres), le fils ne doit pas l’écouter, car le respect d’Hashem prime toujours sur le respect du père, et le père est lui aussi tenu d’écouter les paroles de nos maîtres.
C’est ainsi que tranche également MARAN dans le Shoul’han ‘Arou’h (Y.D 240-15).
C’est également ainsi qu’a tranché sur un problème similaire le Gaon MABYT – dans une Tshouva (tome 1 chap.139) - au sujet d’une personne qui avait fait le voeu d’émigrer à Tsfat en Israël, et dont le père lui demande d’annuler son vœu et de ne pas émigrer en Israël. Le MABYT tranche que cette personne n’est pas autorisée à annuler son vœu et doit émigrer en Israël sans obéir à son père, car la Mitsva d’habiter en Israël représente une grande Mitsva même de notre époque. De plus, le MABYT ajoute que ce fils ne transgresse aucun interdit en refusant d’écouter son père sur ce point, car ses parents peuvent eux aussi émigrer avec lui en Israël où il pourra continuer à les honorer.
Nous pouvons en déduire qu’il est certain qu’il est interdit de « descendre » d’Israël vers l’étranger même dans le but d’accomplir la Mitsva de respecter son père et sa mère.
Cependant, il existe un cas d’exception qui est celui du fils qui désire quitter Israël seulement pour une courte visite auprès de ses parents, afin de les honorer et de se réjouir avec eux, en quittant Israël seulement de façon provisoire. Ce cas est permis, car cette situation ne s’assimile pas au fait d’annuler réellement la Mitsva d’habiter en Israël, comme l’écrit le RASHBATS dans une Tshouva (tome 3 chap.280), qu’il ne faut permettre de quitter Israël seulement pour étudier la Torah, ou pour accomplir la Mitsva de respecte ses parents.
Beaucoup de décisionnaires – comme le Pit’hé Tshouva sur Even Ha-Ezer (75 note 6)- se sont déjà interrogé sur le réel sens des propos du RASHBATS puisqu’il est certain qu’il n’existe aucune permission de quitter définitivement Israël pour accomplir la Mitsva de respecter ses parents. Cette opinion contredit apparemment celle du MABYT citée plus haut.
Mais le Gaon Rabbi Matslia’h MAZOUZ z.ts.l répond dans son livre Shou’t Ish Matslia’h (tome sur Y.D chap.30) en disant qu’il s’agit ici de quitter Israël pour un court moment afin d’aller visiter ses parents et de revenir immédiatement après en Israël. Dans un tel cas, la Mitsva d’habiter Israël est provisoirement repoussée vis-à-vis de la Mitsva de respecter ses parents. Mais il ne faut absolument pas autoriser à rester définitivement en dehors d’Israël pour respecter la volonté de ses parents.
Rédigé et adapté par R. David A. PITOUN France 5769 sheelot@free.fr
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