Comme chaque année à cette période, je vous transmet une lettre que j'ai rédigé il y a 3 ans en réponse à une question qui m'a été posée concernant le fait d'étudier la Torah les 24 et 25 décembre.
Voici cette lettre:
David A. PITOUN Rav enseignant la Hala’ha à Lyon France Tel : 06.18.39.08.29 | iuyhp /t sus צרפת iuthk rhgc vfkvc rugha shdnu cr Tel : 06.18.39.08.29 |
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Villeurbanne, le 18 juillet 2007 – 3 Av 5767
A mon cher Rabbi David ROUBACH uwwhv
Suite à ta question au Shiour d’hier soir, concernant la tradition de ne pas étudier à la date de la naissance de « l’inventeur du plus gros mensonge universel », je te fais part de l’opinion des Poskim à ce sujet.
Le Shou’t Yabi’a Omer , de notre maître, couronne et gloire de notre génération, le Rav Ovadia YOSSEF shalita (tome 7 Yoré Déa Chap.20) considère qu’il n’y a rien de concret dans une telle tradition, et qu’elle n’a aucun fondement Hala’hic. Il atteste que nos maîtres ne se sont jamais abstenus d’étudier à cette date, et il fait référence à de nombreuses citations de nos ‘Ha’hamim sur l’importance de l’étude de la Torah.
En voici quelques-unes :
Dans la Guemara Erouvin 65a :
« La nuit n’a été créée que pour l’étude. »
Dans la Guemara Mena’hot 99b:
Ben Dama, le neveu de Rabbi Ishmael, demanda un jour à son oncle :
« Moi qui a étudié toute la Torah, ai-je le droit d’aller étudier les sciences grecques ? »
Rabbi Ishmael lui répondit : « Il est écrit : « Ce livre de la Torah ne quittera pas ta bouche, et tu l’étudieras jour et nuit ! » Cherche une heure qui ne fait partie ni de la journée, ni de la nuit, si tu la trouves, consacre-la à l’étude des sciences grecques !»
Nous constatons qu’il n’existe pas un instant pendant lequel on peut se soustraire à l’obligation d’étudier la Torah.
Dans le Talmoud Yeroushalmi (fin de Bera’hot) :
Rabbi Shim’on Ben Lakish dit : j’ai trouvé écrit dans un livre mystérieux : « Si tu m’abandonnes pendant un jour, je t’abandonnerai pendant deux jours … »
Cependant, le Shou’t Yabi’a Omer fait aussi mention de ce qui est rapporté dans le livre Taamé Ha-Minhagim (page 500), au nom du livre Likouté Ha-Pardess, et voici ses propos :
« La raison pour laquelle dans ces contrées (Europe de l’Est), nous nous abstenons d’étudier la Torah pendant la nuit de leur fête, réside dans le fait que les non-juifs commettent ce soir-là des agressions à l’encontre des juifs, et les prennent à part dans la rue en les frappant, et parfois en les assassinant. Chaque juif qui marche dans la rue ce soir-là s’expose à un danger de mort. C’est pour cela que les grands de cette génération ont décrété sur tous les étudiants des Yeshivot, ainsi que sur tous les enseignants, de rester chez eux ce soir-là, et de ne pas sortir dans les rues, de peur de risquer un grand danger. »
Il semble que c’est de là qu’est née cette erreur de croire que l’on ne doit pas étudier à cette date là.
Comme on peut le constater, la décision prise n’était pas « de ne pas étudier », mais « de rester chez soi » pour ne pas courir un grand danger de la part des non-juifs.
Aujourd'hui (bien que nous ne sommes pas spécialement plus en sécurité et que la haine des non-juifs à notre égard est loin d’avoir diminué !) nous ne pouvons quand même pas dire que nous courons un danger en allant étudier un soir de 24 décembre plus que tout autre soir de l’année !
Il est vrai que le Taamé Ha-Minhagim cite également une autre raison à cette tradition, au nom de l’auteur du livre Reguel Yeshara, le Tsadik de DINOV z.ts.l, selon qui si l’on n’étudie pas à cette date là, c’est parce que ce jour-là est né celui que la chrétienté vénère, et que « la tradition d’Israël a force de loi » (Minhag Israël Torah Hou).
Le Taamé Ha-Minhagim cite également dans les notes, que même le Gaon Rabbi Yonatan Eïvshitz z.ts.l aurait appliqué lui aussi à cette tradition de ne pas étudier la Torah à cette date-là le principe « la tradition d’Israël a force de loi » (Minhag Israël Torah Hou).
Cependant, cette tradition ne s’est jamais propagée dans les pays Séfarades.
Même cette nuit-là, les Séfaradim ont toujours étudié, comme toutes les autres nuits de l’année.
Le Yabi’a Omer fait aussi mention de ce qu’il a vu écrit dans la brochure Yagdil Torah (Jérusalem 1969 chap.110, page 147) au nom du Admour de Loubavitsh z.ts.l qui écrit :
« Notre tradition est de ne pas étudier la Torah pendant cette nuit… cette tradition a pour raison le fait de ne pas attirer de la « sainte vitalité » sur cet homme, comme sur tous ceux qui marchent dans sa voie. Par conséquent, les juifs qui habitent les pays arabes n’ont pas du tout cette tradition. Et puisque le fait d’arrêter d’étudier la Torah représente une « chose nouvelle » (un ‘Hidoush), nous ne lui donnons pas plus s’importance que tout autre ‘Hidoush. C’est pour cela qu’il ne faut arrêter que la nuit, et cela uniquement jusqu’à ‘Hatsot (la moitié de la nuit). »
Le Yabi’a Omer cite aussi les propos du ‘Hatam Sofer rapportés dans Kovets Shou’t ’Hatam Sofer (édité à Jérusalem en 1963, chap.31).
En effet, le ‘Hatam Sofer a été consulté sur la crédibilité de cette tradition de ne pas étudier à cette date là, et il a répondu :
« Je n’ai jamais entendu une explication acceptable sur cela, et cela, bien que des usages en vigueur vont dans ce sens, puisque les gens s’abstiennent même de pratiquer l’intimité conjugale ce soir là, et que les Mikvahot ferment leurs portes à cette date, cependant, selon mon avis, cette tradition est absurde, et il faut faire remontrance à ceux qui la respectent.
Toutefois, puisque cette nuit-là, les non-juifs se réunissent dans leurs églises à partir de minuit, tandis que ceux qui étudient la Torah sont majoritairement éveillés au début de la nuit et étudient la Torah jusqu’à minuit, pour ne pas que le Satan puisse mettre Israël en accusation d’aller dormir pendant que les non-juifs s’adonnent eux à leur culte, la tradition est d’aller dormir et de ne pas étudier cette nuit-là du début de la nuit jusqu’à minuit. Puis, à minuit on se lève et on va étudier… »
Nous constatons que le Gaon ‘Hatam Sofer z.ts.l s’est effectivement forcé à essayer de trouver une explication, mais pour une tradition qui était en vigueur dans son pays.
Mais – comme nous l’avons précisé plus haut - une telle tradition n’a jamais été entendue, ni diffusée, ni mentionnée dans tous les pays d’orient.
Dans toutes les institutions Sefarades, nous étudions la Torah même à cette date, sans apporter la moindre considération à cet argument.
En l’honneur de la Torah et de ceux qui l’étudient
David Avraham PITOUN
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