Erreur dans les Bera’hot
Cette Hala’ha est dédiée à la Refoua Shelema – la guérison complète de ma chère maman Simi Bat Leah, ainsi que pour la Refoua Shelema du Gaon et Tsaddik Rabbi Morde’haï Tsema’h Ben Mazal Tov (le Rav Morde’haï Eliyahou shalita)
Question
Quel est le Din lorsqu’on s’est trompé de Bera’ha sur un fruit ?
Décision de la Hala’ha
Sur un fruit de l’arbre (comme une pomme ou une poire), on récite la Bera’ha de Boré Peri Ha’ets.
Sur un fruit de la terre (comme une tomate ou un concombre), on récite Boré Peri Haadama.
Si l’on a récité Boré Peri Haadama sur des fruits de l’arbre, on est quitte de son devoir.
Si l’on a récité Boré Peri Ha’ets sur des fruits de la terre, on n’est pas quitte de son devoir.
Sur tous les fruits (ou tout aliment), si l’on a récité Shehakol Nihya Bidvaro, on est quitte.
Sources et développement
Il est enseigné dans la Mishna - traité de Bera’hot (35a) :
Sur un fruit de l’arbre (comme une pomme ou une poire), on récite la Bera’ha de Boré Peri Ha’ets.
Sur un fruit de la terre (comme une tomate ou un concombre), on récite Boré Peri Haadama.
Une autre Mishna du traité Bera’hot (40a) enseigne :
Si l’on a récité Boré Peri Haadama sur des fruits de l’arbre, on est quitte de son devoir. Si l’on a récité Boré Peri Ha’ets sur des fruits de la terre, on n’est pas quitte de son devoir. Sur tous les fruits, si l’on a récité Shehakol Nihya Bidvaro, on est quitte.
C'est-à-dire : si une personne se trompe et récite Boré Peri Haadama sur un fruit dont la véritable Bera’ha est Boré Peri Ha’ets, cette personne est quitte de l’obligation de la Bera’ha, car tous les fruits proviennent de la terre, et par conséquent, la Bera’ha de Boré Peri Haadama est relative à tous les fruits, y compris ceux dont la véritable Bera’ha est Boré Peri Ha’ets.
Même s’il est certain que Le’hate’hila (à priori), il est interdit de réciter Boré Peri Haadama sur les fruits de l’arbre, malgré tout, Bedi’avad (à posteriori), si l’on a récité par erreur Boré Peri Haadama sur un fruit de l’arbre, on est quitte de l’obligation de la Bera’ha, et il ne faut pas recommencer et dire Boré Peri Ha’ets.
Telle est l’opinion de tous les Rishonim (décisionnaires de l’époque médiévale), ainsi que de MARAN[D1] dans le Shoul’han Arou’h (O.H 206 parag.1).
Cependant, MARAN cite – dans le Beit Yossef – l’opinion du RAMBAM[D2] (chap.8 des Hal. Bera’hot Hal.10) selon laquelle, si l’on a récité Boré Peri Haadama sur un fruit de l’arbre, on n’est pas quitte.
Mais dans le Kessef Mishné – son commentaire sur le Rambam – MARAN écrit :
« Ce que j’ai écris dans le Beit Yossef au sujet de l’opinion du Rambam selon laquelle, si l’on a récité Boré Peri Haadama sur un fruit de l’arbre, on n’est pas quitte, ceci est sur la base d’une version du Rambam que j’avais en ma possession à ce moment là. Mais plus tard, j’ai découvert une autre version du Rambam selon laquelle, si l’on a récité Boré Peri Haadama sur un fruit de l’arbre, on est quitte, et cette version est la plus juste puisqu’elle est en accord avec la Mishna… »
l’auteur du Mele’het Shelomo (Rabbi Shelomo ADANI du Yemen)[D3] cite dans son commentaire sur les Mishnayot Bera’hot (chap.6 Mishna 2), les propos de MARAN dans le Kessef Mishné selon lesquels, il revient sur l’interprétation de l’opinion du Rambam citée dans le Beit Yossef, et il conclut en disant qu’il a trouvé lui aussi une version manuscrite du Yad Ha’hazaka (l’ouvrage du Rambam) provenant de Syrie, corrigée et signée de la propre main du Rambam, et dans laquelle il était également écrit : « si on a récité Boré Peri Haadama sur un fruit de l’arbre, on est quitte. »
Les A’haronim admettent également que la vraie version de l’opinion du Rambam est que l’on est quitte, comme en attestent :
- Le Tossafot Yom Tov[D4]
- Le Kenesset haGuedola[D5] (chap.206)
- Le Shou’t Shaagat Ariyé[D6] (chap.23)
Et d’autres…
Puisqu’on est quitte de son obligation lorsqu’on a récité Boré Peri Haadama sur un fruit dont la véritable Bera’ha est Boré Peri Ha’ets, les Poskim (décisionnaires) écrivent que lorsque les décisionnaires de la Hala’ha ont un doute sur la Bera’ha qu’il faut réciter sur un fruit, est-ce que sa Bera’ha est Boré Peri Ha’ets ou bien Boré Peri Haadama, il faut – dans ce cas – réciter Boré Peri Haadama, et non pas Shehakol Nihya Bidvaro.
En effet, la Bera’ha de Boré Peri Haadama est une Bera’ha beaucoup plus précise vis-à-vis d’un fruit (quel que soit sa provenance), alors que Shehakol Nihya Bidvaro est une Bera’ha au sens plus général, comme l’écrivent les Tossafot[D7] (Bera’hot 39a, titre « ‘Haviv ‘Adif… » et 41a, titre « Aval… »).
Tel est l’avis de tous les Rishonim, ainsi que de MARAN dans le Shoul’han ‘Arou’h (O.H chap.206 parag.1), et tel est aussi l’avis du RAMA[D8] dans ses notes sur le Shoul’han ‘Arou’h (O.H chap.202 parag.18).
Il est vrai que l’auteur du ‘Olat Tamid[D9] écrit (206 note 1) sur les propos du Shoul’han ‘Arou’h :
« Il me semble qu’étant donné que le Rambam pense que si l’on a récité Boré Peri Haadama sur un fruit de l’arbre, on n’est pas quitte (dans la 1ère version des propos du Rambam, voir plus haut), en cas de doute sur la Bera’ha du fruit, il est préférable de réciter Shehakol Nihya Bidvaro selon tous les avis, bien que Shehakol Nihya Bidvaro est une Bera’ha générale, malgré tout, en cas de doute sur les Bera’hot, on ne doit pas réciter Boré Peri Haadama. »
Mais le Gaon Rabbi Yehouda ‘Ayash[D10] – dans son livre Maté Yehouda (206 note 1) – réfute les propos du ‘Olat Tamid et lui reproche de ne pas avoir vu les propos de MARAN dans le Kessef Mishné (voir plus haut) où il atteste que la vraie version de l’opinion du Rambam est que si l’on a récité Boré Peri Haadama sur un fruit de l’arbre, on est quitte. Selon cela, MARAN tranche donc correctement dans le Shoul’han ‘Arou’h en disant que si l’on a un doute sur la Bera’ha du fruit, il est préférable de réciter Boré Peri Haadama qui est une Bera’ha précise (elle parle au moins de fruits), et non Shehakol Nihya Bidvaro qui est une Bera’ha générale.
Notre maître le ‘HYDA dans son commentaire Birké Yossef[D11] (sur O.H 206 note 4) réfute de la même façon les propos du Ora’h ‘Haïm Ha-Kadosh (Rabbenou ‘Haïm BEN ATTAR z.ts.l)[D12] qui conteste l’opinion de Maran sur ce point dans son livre Rishon Letsion, où il écrit que dans un cas de doute sur un fruit, il faut réciter Shehakol Nihya Bidvaro et non Boré Peri Haadama. Le ‘Hyda réfute ses propos et rétablie la position de MARAN et de tous les Rishonim selon qui, dans un cas de doute sur un fruit, il faut réciter Boré Peri Haadama.
L’auteur du Ben Ish ‘Haï (Rabbenou Yossef ‘HAÏM de Bagdad z.ts.l)[D13] s’écarte et tranche de façon évidente (dans son livre Ben Ish ‘Haï - Parasha de Pin’hass, note 16 - et dans son livre Shou’t Rav Pe’alim – section O.H chap.27) qu’en cas de doute sur le fruit, ou bien dans le cas où cela fait l’objet d’une Ma’hloket (divergence d’opinion Hala’hic) parmi les Poskim (décisionnaires), il faut réciter Shehakol Nihya Bidvaro sur le fruit.
Mais avec tout le respect et l’égard que nous devons à notre maître Rabbi Yossef ‘HAÏM z.ts.l ainsi qu’à sa Torah et à l’immensité de sa sagesse, ses propos ne sont pas du tout justifiés du point de vue de la Hala’ha, et l’opinion essentielle reste celle de MARAN, du Rama, ainsi que tous les Rishonim et A’haronim précédemment cités.
Telle est l’avis de nombreux autres A’haronim, comme :
· Rabbi Shneour Zalman de Lyadi[D14] dans son Shoul’han ‘Arou’h (chap.206 parag.1)
· Le ‘Hayé Adam[D15] (règle 58, chap.4)
· Le Kitsour Shoul’han ‘Arou’h de Rabbi Shelomo GUENSFRIED[D16] (chap.56, note 2)
· Le ‘Hessed Lealafim[D17] (chap.206 parag.1)
· Le Pené Its’hak (Aboul’afiya)[D18] (tome 1, section des Bera’hot, note 53)
· Le ‘Arou’h Hashoul’han[D19]
Il est vrai que le Gaon Rabbi Ben Tsion ABBA SHAOUL z.ts.l[D20] tranche dans son livre Or Letsion (tome 2, chap.307, note 72) qu’il faut réciter Shehakol Nihya Bidvaro en cas de doute sur un fruit, à l’encontre de tous les Poskim cités précédemment, mais notre maître le Rav Ovadia YOSSEF shalita réfute son opinion dans son livre Shou’t Yabiya’ Omer (tome 9 chap.108, note 98).
A la lueur de tout cela, nous comprenons facilement la raison pour laquelle MARAN tranche dans le Shoul’han ‘Arou’h (O.H chap.203 parag .3) qu’il faut réciter Boré Peri Haadama sur la banane, car les Poskim discutent afin de définir si elle est un fruit de l’arbre ou bien un fruit de la terre.
Le Mishna Beroura[D21] écrit sur place qu’il en est de même pour tout fruit dont la Bera’ha fait l’objet d’une Ma’hloket (divergence d’opinion Hala’hic), ou sur laquelle il y a un doute, Leh’ateh’ila (à priori), sa Berah’a est Boré Peri Haadama.
Par contre, si une personne récite par erreur Boré Peri Ha’ets sur un légume dont la véritable Bera’ha est Boré Peri Haadama, cette personne n’est pas quitte de son obligation, et a récité une Bera’ha Levatala (une Bera’ha en vain). Elle est tenue de recommencer et dire Boré Peri Haadama, car la Bera’ha de Boré Peri Ha’ets n’est pas une Bera’ha qui inclut également les fruits de la terre, car ils ne poussent pas sur les arbres.
Sur n’importe quel aliment – aussi bien des fruits de l’arbres que des fruits de la terre - si l’on a récité par erreur Shehakol Nihya Bidvaro, on est quitte de l’obligation de la Bera’ha, car ils ont tous été crées par la Parole d’Hashem lorsqu’ Il a dit « Que le monde soit ».
Nos maîtres discutent dans la Guemara, sur le cas de la personne qui a récité Shehakol sur du pain ou sur du vin. Cette personne est-elle quitte de son obligation ou pas ?
Sur le plan de la Hala’ha, les Rishonim (décisionnaires de l’époque médiévale) ainsi que MARAN l’auteur du Shoul’han Arouh’ tranchent que même si l’on a récité Shehakol Nihya Bidvaro sur du pain, on est quitte de son obligation, et il ne faut pas recommencer la Bera’ha. C’est de là que vient l’expression « Shehakol acquitte de tout »).
Rédigé et adapté par R. David A. PITOUN France 5769 sheelot@free.fr
(à partir des écrits du Gaon Rabbi Ya’akov SASSON shalita)
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[D1]Maran ou « Notre maître » en araméen. Rabbi Yossef Karo, 16ème siècle, Espagne – Israël, l’auteur du Beit Yossef et du Shoul’han Arou’h
[D2]RaMBaM ou Maïmonide Rabbi Moshé Ben Maïmon Espagne – Egypte 12ème siècle
[D3]Mele’het Shelomo Rabbi Shelomo ‘ADANI Yémen - Israël 17ème siècle Elève de Rabbi ‘Haïm Vittal et de Rabbi Betsal’el ASHKENAZI (la Shita Mekoubetset)
[D4]Tossafot Yom Tov (Rabbi Yom Tov LIPMANN HELLER – Allemagne, Pologne 17ème siècle
[D5]Kenesset Haguedola Rabbi ‘Haïm Benbeneshti Turquie 18ème siècle
[D6]Rabbi Arieh Leïb WOLLERSHTEIN Russie 18ème siècle, auteur du Shaagat Ariéh
[D7]Tossafot gendres et petits enfants de RASHI. Commentateurs et décisionnaires de France et d’Allemagne 11ème et 12ème siècle
[D8]RaMA Rabbi Moshé ISSERLEISS Pologne 16ème siècle, opinion Hala’hic principale pour les Ashkenazim
[D9]Olat Tamid Rabbi Shemouel Bar Yossef Europe de l’est 18ème siècle, auteur du Olat Shabbat
[D10]Maté Yéhouda Rabbi Yehouda Ayash Algérie 18ème siècle
[D11]Birké Yossef notre maître le ’HYDA Rabbi ‘Haïm Yossef David Azoulaï, 18ème siècle
[D12]Rabbenou ‘Haïm BEN ATTAR Maroc – Israël 18ème siècle
[D13]Ben Ish ‘Haï Rabbi Yossef ‘HAÏM Irak 19ème siècle Auteur de nombreux ouvrages, dont Shou’t Rav Pe’alim, ‘Od Yossef ‘haï et d’autres…
[D15]Hayé Adam Rabbi Avraham DANZTIG Allemagne 19ème siècle
[D16]Kitsour Shoul’han ‘Arou’h (« L’abrégé du Shoul’han ‘Arou’h ») Rabbi Shelomo GANSFRIED. Europe de l’est 19ème siècle.
[D17]Hessed Lealafim Rabbi Eli’ezer PAPO , auteur du célèbre Pélé Yo’ets. Rav de la ville de Silistra en Bulgarie 19ème siècle
[D18]Rabbi Its’hak ABOUL’AFIYA Syrie Israël 19ème siècle. Il fut Av Beit Din de Damas et auteur de nombreux ouvrages de Hala’ha dont le Shou’t Péné Its’hak et autres…
[D21]Mishna Beroura Rabbi Israël Meïr HaCohen de Radin, le « ‘Hafets ’Haïm », Russie 20ème siècle, également auteur de ‘HAFETS ‘HAÏM, et de SHMIRAT HALASHON entre autres.
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