QUELQUES REGARDS SUR
KORA’H
La révolte de Kora’h
Contexte
Kora’h fils de Itshar, de la tribu de Levi, est le cousin de Moshé Rabbenou et d’Aharon Ha-Cohen. Il fomente une rébellion contre Moshé et Aharon, en prétendant que le peuple n’a pas besoin de dirigeants puisqu’il n’est constitué que d’hommes saints. Kora’h arrive à convaincre 250 chefs de Sanhedrin (Tribunaux rabbiniques), ainsi que Datan et Aviram, les contestataires par vocation, et Onn fils de Pelet, issus de la tribu de Réouven. Kora’h et ses compagnons revendiquent le pouvoir et la Kehouna Guedola (la Grande Prêtrise), qui selon eux, reviennent autan à Moshé et à Aharon qu’à n’importe qui d’autre. Ils vont même jusqu’à semer le doute à travers le peuple sur la légitimité, et la foi qu’il faut accorder à la prophétie de Moshé Rabbaenou, et qu’il aurait inventé totalement tout les paroles et enseignements qu’il leur aurait transmis au nom d’Hashem. Moshé demande à Hashem de rendre son jugement, la terre s’ouvre et engloutie Kora’h, ses 250 compagnons, leur familles, ainsi que tous ce qu’ils possèdent.
1. Tout vient à point à qui sait attendre !!
Kora’h fils de Isthar fils Kehat fils de Levi prit… (Bamidbar 16-1, 1er verset de notre Parasha)
Rashi : Il se prit lui-même et se mit en marge du peuple en revendiquant la prêtrise.
Le Tsaddik Rabbi Sim’ha Boneïm de la ville de Peshis’ha fait la remarque suivante :
Kora’h était doté de nombreuses qualités puisqu’il était : membre d’une famille illustre ; Talmid ‘Ha’ham (érudit dans la Torah) ; riche ; intelligent…
Il possédait donc des prédispositions naturelles pour atteindre – avec le temps – le statut de dirigeant du peuple d’Israël.
Quel est donc le facteur qui l’empêcha d’atteindre un tel objectif ?
Tout simplement son impétuosité !
Le fait de s’être « prit lui-même » et de ne pas avoir attendu le jour où le peuple lui-même l’aurait choisit pour dirigeant. Au lieu de cela, Kora’h força le destin et voulut régner sur les tribus d’Israël par la querelle et la discorde.
Pour une telle faute, Kora’h va subir un châtiment assez particulier.
En effet, le texte dit plus loin dans notre Parasha : « La terre s’ouvrit et les engloutis – eux ainsi que leurs foyers… »
En réalité, ce châtiment correspond au principe de « Mida Kenegued Mida » (« Mesure pour mesure ») :
Kora’h et ses compagnons n’ont pas attendu que le destin leur sourit et que leur soient confiés les rennes du pouvoir. De même, la terre n’a – elle aussi – pas attendu le moment qui est défini pour chaque être humain d’être « engloutit » de façon naturelle, et ils furent tous engloutis « prématurément » eux ainsi que tout ce qu’ils possédaient.
La plus grande difficulté pour un individu c’est de savoir attendre le bon moment !!
2. Le véritable dirigeant
Que vit Kora’h de particulier pour se quereller avec Moshé ? Il vit la loi de la vache rousse. (Pessikta Zoutarta sur ‘Houkat)
Petit rappel
Dans la Parasha de ‘Houkat - que nous lirons avec l’aide d’Hashem la semaine prochaine (en dehors d’Israël) -
Hashem ordonne à Moshé et à Aharon le commandement de Para Adouma – La vache rousse.
Cette Mitsva consiste à se procurer une vache totalement rousse, sans la moindre imperfection, et qui n’a jamais porté de poids. On procédait à la Shé’hita – l’abatage rituel de cette vache, puis elle était complètement brûlée. Les cendres de la vache étaient mélangées à de l’eau du Beit Hamikdash, et toute personne ou objet ayant été au contact ou en présence d’un mort (juif), étaient aspergés de ce mélange, et retrouvaient leur statut de purs.
Ce qui fait du commandement de Para Adouma, une « ‘Houka » – une loi irrationnelle, c’est que justement, celui qui aspergeait les personnes ou objets afin de les rendre purs, devenait lui-même impur. Il devait lui-même suivre un nouveau processus de purification.
Kora’h prétend en réalité que même si Aharon est apte à occuper les fonctions de Cohen Gadol (grand prêtre), malgré tout l’ensemble du peuple d’Israël l’est aussi, et en particulier les membres de la tribu de Levi qui méritent davantage cette fonction plus qu’Aharon puisqu’il porte – d’une certaine façon – une part de responsabilité dans la faute du veau d’or. Et même si l’on prend en considération le fait qu’Aharon n’avait qu’une intention « Leshem Shamaïm » (une intention pure et dirigée vers Hashem) lors de la faute du veau d’or, il n’en reste pas moins une trace de faute sur sa personne. Ce qui n’est pas le cas du reste de la tribu de Levi qui n’a absolument pas participé à cette faute.
Preuve en est qu’Aharon garda aux yeux d’Hashem une certaine responsabilité dans la faute du veau d’or puisque le texte dit au sujet de la vache rousse : « Vous la confierez à El’azar le Cohen fils d’Aharon)… » et Rashi commente : El’azar et non Aharon puisqu’un accusateur ne peut être défenseur.
(Explication : l’une des propriétés de la Mitsva de la vache rousse est d’expier la faute du veau d’or, puisque lorsque le petit fait des saletés, c’est la maman qui vient les nettoyer ! Or, Aharon a été celui qui provoqua - d’une certaine façon - la conception du veau d’or, et il entraîna par cela la mise en accusation d’Israël, de ce fait il ne peut être celui qui contribue à l’expiation de leur faute.)
par conséquent, Kora’h prétend que même si Aharon peut occuper les fonctions de Cohen Gadol, d’autres en sont beaucoup plus dignes.
C’est donc ce que veulent dire les mots de ce Midrash :
Kora’h vit la loi de la vache rousse, et en déduit qu’Aharon avait gardé aux yeux d’Hashem une certaine responsabilité dans la faute du veau d’or, et il en profita pour se quereller contre Moshé et Aharon.
Mais en réalité, l’implication d’Aharon dans la faute du veau d’or ne représente pas un défaut sur sa personnalité, au contraire, c’est justement son attitude qui lui a été favorable pour être choisit par Hashem pour occuper les fonctions de Cohen Gadol et pour servir fidèlement dans le Temple afin d’expier les fautes d’Israël.
En effet, en acceptant de participer à la conception du veau d’or, Aharon se sacrifia en faveur d’Israël.
La Guemara Sanhedrin (7b) commente un verset écrit au sujet du veau d’or : « Aharon vit et construisit un autel devant lui… » Il constata que le peuple avait assassiné ‘Hour qui voulait empêcher la faute du veau d’or.
Aharon se dit alors :
« Si je n’exécute pas ce qu’ils me demandent de faire, ils m’assassineront comme ils ont assassiné ‘Hour, et se réalisera alors la futur prophétie (écrite dans le Livre de Ei’ha) « Si le Cohen et le prophète sont assassinés dans le Sanctuaire d’Hashem… » Ils n’auront plus la moindre chance que leur repentir soit accepté par Hashem. Il est donc préférable de confectionner le veau d’or – même si cela doit me coûter une mise en accusation aux yeux d’Hashem – mais de leur laisser ainsi une chance de se racheter plus tard par le repentir (la faute du veau d’or serait apparemment moins grave aux yeux d’Hashem que l’assassinat du Cohen).
Une telle attitude de sacrifice et d’investissement pour le peuple est celle du véritable dirigeant.
Nous pouvons en déduire que la nomination d’un chef spirituel ne doit pas être motivée uniquement par son irréprochabilité (même si elle reste capitale), mais aussi par son esprit et sa volonté à se donner pour ceux qu’il est amené à diriger.
Malheureusement, nous déplorons de notre époque la nomination (souvent motivée par de multiples intérêts) de dirigeants spirituels dont le seul souci est de savoir combien de personnes vont se lever devant eux lors de leur passage ou de leur montée à la Torah !!!!
Qui plus est, les fonctions et l’autorité de ces gens seraient remises en question même par Kora’h lui-même puisque selon son calcul, il faut être totalement irréprochable pour diriger le peuple, ce qui est loin d’être le cas de beaucoup de nos chers « dirigeants spirituels » tous aussi impliqués dans des conflits d’intérêts les uns que les autres, et qui ont une certaine facilité à mettre entre parenthèses certains paragraphes du Shoul’han ‘Arou’h dès lors qu’il s’agit de pouvoir et d’argent !!!!
Mieux encore !
Dans certaines grandes villes de France, certains « Dayanim » n’hésitent pas à faire preuve de véritable tyrannie pour affermir leur pouvoir, en proférant des propos des plus odieux à l’égard de pauvres membres de leur communauté qui ont le malheur d’oser vouloir en savoir plus sur certaines choses, de vouloir tout simplement apprendre une Torah que ces « Grands Rabbanim » ne sont pas en mesure de leur transmettre, mais ne sont pas non plus disposés à avouer une telle faiblesse !!
Que dire de la Casherout qui n’est souvent certifiée que par le niveau relationnel entre le commerçant et le « Dayan » !! (Quand ce n’est pas par le montant du chèque adressé non pas au profit de l’organisme de Casherout, mais au profit du « Dayan » lui-même pour financer ses propres réjouissances familiales !!!)
De pauvres gens naïfs se laissent véritablement extorquer leur argent (au sens propre du terme et le mot reste faible) par des gens qui portent des barbes et des chapeaux et qui doivent être pris au sérieux simplement parce qu’ils occupent des fonctions officielles, et qui font croire toutes sortes d’absurdités en échange de quelques billets que l’on doit vite offrir à tel ou tel envoyé d’un établissement de Torah, de passage pour collecter des fonds, et cette argent assurera la « réussite » au pauvre naïf qui ne réussira finalement qu’à se faire berner par le mensonge de gens sans scrupules mais qui occupent des fonctions officielles pour – en réalité - servir seulement leurs propres intérêts !!
Comment ce fait-il qu’il est impossible de voir la Semi’ha (diplôme) d’un Dayan en poste depuis environ 15 ans ?!!
Comment peut-on lui confier la prononciation de divorces religieux, de conversions, de certifications de Casherout, ou tout simplement des questions d’ordres Hala’hiques des plus complexes qui requièrent un certificat émanant d’une autorité Hala’hique officielle, alors qu’il a toujours refusé de produire les documents officiels qui lui confèrent toutes ces aptitudes ?!
Comment se fait-il que les conversions – qui font naturellement parties des prérogatives d’un Dayan – sont « confiées » (pour certains dossiers) à une personne duquel les employeurs du Dayan n’ont jamais entendu parler, au moins sur le plan officiel ?!
Qui plus est, cet « assistant » en retire un excellent moyen de subsistance puisqu’il n’hésite pas à facturer 20 € chaque séance d’une vingtaine de minutes pendant laquelle il reçoit le candidat à la conversion, et où il se contente de lui poser quelques questions sur sa progression dans l’apprentissage du judaïsme, alors que d’autres personnes font le véritable travail par des enseignements très approfondis, en formant concrètement des gens qui deviendront par la suite de vrais juifs pratiquants avec de solides acquis, et ces gens n’ont pourtant jamais réclamer quoi que ce soit en échange d’un travail digne de ce nom !!
Et tout ceci est totalement ignoré des employeurs du Dayan.
La conversion est certes un domaine extrêmement délicat qui requiert – au-delà des compétences Hala’hiques – une forte intuition afin d’établir de façon formelle la sincérité de la personne désirant se convertir.
Mais un Dayan doit aussi rechercher la vérité et la justice.
Pourquoi se laisse t-il – systématiquement et de façon très ferme – influencer par la moindre rumeur (dont la source est presque toujours une personne ayant de l’animosité envers le candidat) qui pourrait remettre en question la sincérité d’un candidat en conversion, et décide t-il immédiatement de stopper le dossier compromis, sans prendre soin de vérifier les faits auprès de gens dont l’objectivité est indéniable ? Combien de rumeurs courent-elles au sujet du Dayan lui-même, et pourtant personne n’envisage sa disqualification !!!!! (Malheureusement ?)
Une ville entière reste privée de la consommation de certains aliments sous prétexte que le niveau de Casherout de cette ville est plus exigeant qu’ailleurs, alors que des organismes de Casherout réputés pour leur rigueur et leur intransigeance au niveau Hala’hique autorisent ces mêmes aliments.
N’est-il pas plutôt question de faiblesse et d’incompétence plutôt que d’exigence Hala’hique ?!
Des questions Hala’hiques de sujets identiques sont régulièrement posées au « Dayan » et reçoivent pourtant des réponses différentes : on permet à l’un ce que l’on interdit à l’autre.
Chacun a des ennemis et nul n’est irréprochable, mais il n’existent pas beaucoup d’individus qui n’ont que des ennemis !!!! (Les quelques autres sont soit des idiots, soit des hypocrites !!)
Kora’h avait réellement tort.
Le véritable dirigeant c’est celui qui œuvre pour sa communauté, et non pas celui qui attend constamment que celle-ci œuvre pour lui !!!!
3. Les religieux au pouvoir
Est-ce donc peu, pour vous, que le D. d'Israël vous ait distingués de la communauté d'Israël, en vous admettant auprès de lui pour faire le service du Mishkan (le Temple provisoire du désert) d’Hashem, et en vous plaçant en présence de la communauté pour la servir?
Il t'a donc approché de lui, toi et tous tes frères, les enfants de Lévi, et vous réclamez encore la Kehouna (la prêtrise) ! » (Bamidbar chap.16 verset 9 et 10)
A travers ces versets, nous voyons de quelle façon Moshé Rabbenou réprimande Kora’h et ses compagnons.
Cependant, une question est posée par le Gaon Rabbi Yehouda Tsadka z.ts.l, (Rosh Yeshiva de Porat Yossef à Jérusalem, décédé en 1991) dans son livre Kol Yehouda :
N’est il pas naturel que celui qui possède 100, désire 200 ?!
Moshé Rabbenou est en train de reprocher à Kora’h et à son assemblée, d’avoir l’un des réflexes qui caractérisent le plus l’être humain : L’AMBITION.
Si Kora’h n’était jusqu’à présent qu’un Levi qui travail dans le Mishkan, comme tous les membres da sa tribu, qu’y a-t-il d’illégitime à désirer d’avantage ?
Le Ktav Sofer (Rabbi Avraham Shmouel Binyamin SOFER, fils du ‘Hatam Sofer Tchecoslovaquie 19ème siècle) répond à cette question en disant que tout d’abord, il est nécessaire de comprendre leurs réclamations contre Moshé Rabbenou.
Puisqu’ils réclament la Kehouna, et cela malgré qu’ils prétendent aussi que toute l’assemblée est sainte, c’est qu’ils reconnaissent qu’il faut un dirigeant ?!
Qu’est ce que cela peut-il changer que ce soit Moshé ou un autre ?!
En vérité, leur véritable reproche envers Moshé Rabbenou est le suivant :
« Comment pouvez vous diriger le peuple, toi Moshé, ainsi que ton frère Aharon, alors que vous n’avez pas subits l’esclavage en Egypte ?!!!!
Vous n’êtes donc pas aptes à diriger un peuple qui a tellement souffert, vous qui n’avez connus aucunes souffrances !!!
Un vrai dirigeant, c’est quelqu’un qui a traversé les souffrances du peuple qu’il dirige !!»
Et à cela, Moshé Rabbenou répond le contenu de nos deux versets du début :
« Est-ce donc peu, pour vous, que le Dieu d'Israël vous ait distingués de la communauté d'Israël, en vous admettant auprès de lui pour faire le service du Mishkan d’Hashem, et en vous plaçant en présence de la communauté pour la servir?
Il t'a donc approché de lui, toi et tous tes frères, les enfants de Lévi, et vous réclamez encore la Kehouna ! »
En clair :
Toi aussi Kora’h, tu es de la tribu de Levi, qui - comme nous le savons - n’a pas du tout pris part à l’esclavage d’Egypte (grâce au fait qu’ils ne sont pas tombés dans le piège de Pharaon), et pourtant, Hashem vous a admis dans son Mishkan, et vous trouvez encore juste de réclamer la Kehouna !
Nous sommes ici face à un débat encore d’actualité :
Qui est apte à gérer le peuple ?
Est-ce uniquement celui qui a connu les souffrances que le peuple a subit, ou bien ce n’est pas un critère qui détermine forcément l’aptitude à diriger ?
Nous constatons que les personnes qui pensent comme Kora’h (et il y en a encore beaucoup de notre époque !!), considèrent qu’un juif orthodoxe, érudit dans la Torah, ne peut pas être un dirigeant de notre société, et non pas pour des raisons de pratiques religieuses, mais tous simplement parce que ce type d’individu n’a pas le même parcours, ni le même vécu, que les gens du peuple.
Mais nous pouvons également constater que la vision qu’Hashem a de la chose, est complètement différente. Le fait que Moshé et Aharon n’aient pas subits l’esclavage d’Egypte, n’en fait pas pour autant des personnes inaptes à diriger un peuple qui lui, a souffert de cet esclavage.
Il y a les critères de jugement qui sont ceux de gens comme Kora’h et son espèce, mais il y a aussi les critères de jugement qui sont ceux d’Hashem et de la Torah !!
Un verset de Tehilim fait allusion à cette révolte de Kora’h :
« Ils ont jalousé Moshé dans le camp, ainsi qu’Aharon, le saint d’Hashem » (Tehilim 106)
On peut interpréter ce verset ainsi :
Moshé et Aharon sont, dans ce verset, des personnages représentant le juif pratiquant, sous deux aspects de la vie :
Moshé Rabbenou qui étudiait la Torah en permanence sous sa tante qui se trouvait à l’extérieur du camp – on lui reproche de ne pas être assez mêlé à la vie active au sein du camp.
On a toujours reproché aux juifs orthodoxes de trop vivre dans leur propre monde, sans se soucier de la société.
Puis, c’est à Aharon, le « saint » d’Hashem, qui l’on reproche des choses. Lui qui a passé toute sa vie mêlé à la société, à toujours essayer de rétablir des relations entre gens fâchés, ou entre maris et femmes …
A lui, on lui reproche de trop s’occuper de la société, et on lui conseille de retourner à sa place, au milieu de ses livres « saints » !!
Quelque soient les choix d’un juif pratiquant, qu’il essaye d’oeuvrer pour la société, ou qu’il ne se soucie que de son élévation spirituelle, il trouvera toujours des Kora’h, des Datan ou des Aviram, pour le montrer du doigt !!!
Shabbat Shalom
KORA’H
La révolte de Kora’h
Contexte
Kora’h fils de Itshar, de la tribu de Levi, est le cousin de Moshé Rabbenou et d’Aharon Ha-Cohen. Il fomente une rébellion contre Moshé et Aharon, en prétendant que le peuple n’a pas besoin de dirigeants puisqu’il n’est constitué que d’hommes saints. Kora’h arrive à convaincre 250 chefs de Sanhedrin (Tribunaux rabbiniques), ainsi que Datan et Aviram, les contestataires par vocation, et Onn fils de Pelet, issus de la tribu de Réouven. Kora’h et ses compagnons revendiquent le pouvoir et la Kehouna Guedola (la Grande Prêtrise), qui selon eux, reviennent autan à Moshé et à Aharon qu’à n’importe qui d’autre. Ils vont même jusqu’à semer le doute à travers le peuple sur la légitimité, et la foi qu’il faut accorder à la prophétie de Moshé Rabbaenou, et qu’il aurait inventé totalement tout les paroles et enseignements qu’il leur aurait transmis au nom d’Hashem. Moshé demande à Hashem de rendre son jugement, la terre s’ouvre et engloutie Kora’h, ses 250 compagnons, leur familles, ainsi que tous ce qu’ils possèdent.
1. Tout vient à point à qui sait attendre !!
Kora’h fils de Isthar fils Kehat fils de Levi prit… (Bamidbar 16-1, 1er verset de notre Parasha)
Rashi : Il se prit lui-même et se mit en marge du peuple en revendiquant la prêtrise.
Le Tsaddik Rabbi Sim’ha Boneïm de la ville de Peshis’ha fait la remarque suivante :
Kora’h était doté de nombreuses qualités puisqu’il était : membre d’une famille illustre ; Talmid ‘Ha’ham (érudit dans la Torah) ; riche ; intelligent…
Il possédait donc des prédispositions naturelles pour atteindre – avec le temps – le statut de dirigeant du peuple d’Israël.
Quel est donc le facteur qui l’empêcha d’atteindre un tel objectif ?
Tout simplement son impétuosité !
Le fait de s’être « prit lui-même » et de ne pas avoir attendu le jour où le peuple lui-même l’aurait choisit pour dirigeant. Au lieu de cela, Kora’h força le destin et voulut régner sur les tribus d’Israël par la querelle et la discorde.
Pour une telle faute, Kora’h va subir un châtiment assez particulier.
En effet, le texte dit plus loin dans notre Parasha : « La terre s’ouvrit et les engloutis – eux ainsi que leurs foyers… »
En réalité, ce châtiment correspond au principe de « Mida Kenegued Mida » (« Mesure pour mesure ») :
Kora’h et ses compagnons n’ont pas attendu que le destin leur sourit et que leur soient confiés les rennes du pouvoir. De même, la terre n’a – elle aussi – pas attendu le moment qui est défini pour chaque être humain d’être « engloutit » de façon naturelle, et ils furent tous engloutis « prématurément » eux ainsi que tout ce qu’ils possédaient.
La plus grande difficulté pour un individu c’est de savoir attendre le bon moment !!
2. Le véritable dirigeant
Que vit Kora’h de particulier pour se quereller avec Moshé ? Il vit la loi de la vache rousse. (Pessikta Zoutarta sur ‘Houkat)
Petit rappel
Dans la Parasha de ‘Houkat - que nous lirons avec l’aide d’Hashem la semaine prochaine (en dehors d’Israël) -
Hashem ordonne à Moshé et à Aharon le commandement de Para Adouma – La vache rousse.
Cette Mitsva consiste à se procurer une vache totalement rousse, sans la moindre imperfection, et qui n’a jamais porté de poids. On procédait à la Shé’hita – l’abatage rituel de cette vache, puis elle était complètement brûlée. Les cendres de la vache étaient mélangées à de l’eau du Beit Hamikdash, et toute personne ou objet ayant été au contact ou en présence d’un mort (juif), étaient aspergés de ce mélange, et retrouvaient leur statut de purs.
Ce qui fait du commandement de Para Adouma, une « ‘Houka » – une loi irrationnelle, c’est que justement, celui qui aspergeait les personnes ou objets afin de les rendre purs, devenait lui-même impur. Il devait lui-même suivre un nouveau processus de purification.
Kora’h prétend en réalité que même si Aharon est apte à occuper les fonctions de Cohen Gadol (grand prêtre), malgré tout l’ensemble du peuple d’Israël l’est aussi, et en particulier les membres de la tribu de Levi qui méritent davantage cette fonction plus qu’Aharon puisqu’il porte – d’une certaine façon – une part de responsabilité dans la faute du veau d’or. Et même si l’on prend en considération le fait qu’Aharon n’avait qu’une intention « Leshem Shamaïm » (une intention pure et dirigée vers Hashem) lors de la faute du veau d’or, il n’en reste pas moins une trace de faute sur sa personne. Ce qui n’est pas le cas du reste de la tribu de Levi qui n’a absolument pas participé à cette faute.
Preuve en est qu’Aharon garda aux yeux d’Hashem une certaine responsabilité dans la faute du veau d’or puisque le texte dit au sujet de la vache rousse : « Vous la confierez à El’azar le Cohen fils d’Aharon)… » et Rashi commente : El’azar et non Aharon puisqu’un accusateur ne peut être défenseur.
(Explication : l’une des propriétés de la Mitsva de la vache rousse est d’expier la faute du veau d’or, puisque lorsque le petit fait des saletés, c’est la maman qui vient les nettoyer ! Or, Aharon a été celui qui provoqua - d’une certaine façon - la conception du veau d’or, et il entraîna par cela la mise en accusation d’Israël, de ce fait il ne peut être celui qui contribue à l’expiation de leur faute.)
par conséquent, Kora’h prétend que même si Aharon peut occuper les fonctions de Cohen Gadol, d’autres en sont beaucoup plus dignes.
C’est donc ce que veulent dire les mots de ce Midrash :
Kora’h vit la loi de la vache rousse, et en déduit qu’Aharon avait gardé aux yeux d’Hashem une certaine responsabilité dans la faute du veau d’or, et il en profita pour se quereller contre Moshé et Aharon.
Mais en réalité, l’implication d’Aharon dans la faute du veau d’or ne représente pas un défaut sur sa personnalité, au contraire, c’est justement son attitude qui lui a été favorable pour être choisit par Hashem pour occuper les fonctions de Cohen Gadol et pour servir fidèlement dans le Temple afin d’expier les fautes d’Israël.
En effet, en acceptant de participer à la conception du veau d’or, Aharon se sacrifia en faveur d’Israël.
La Guemara Sanhedrin (7b) commente un verset écrit au sujet du veau d’or : « Aharon vit et construisit un autel devant lui… » Il constata que le peuple avait assassiné ‘Hour qui voulait empêcher la faute du veau d’or.
Aharon se dit alors :
« Si je n’exécute pas ce qu’ils me demandent de faire, ils m’assassineront comme ils ont assassiné ‘Hour, et se réalisera alors la futur prophétie (écrite dans le Livre de Ei’ha) « Si le Cohen et le prophète sont assassinés dans le Sanctuaire d’Hashem… » Ils n’auront plus la moindre chance que leur repentir soit accepté par Hashem. Il est donc préférable de confectionner le veau d’or – même si cela doit me coûter une mise en accusation aux yeux d’Hashem – mais de leur laisser ainsi une chance de se racheter plus tard par le repentir (la faute du veau d’or serait apparemment moins grave aux yeux d’Hashem que l’assassinat du Cohen).
Une telle attitude de sacrifice et d’investissement pour le peuple est celle du véritable dirigeant.
Nous pouvons en déduire que la nomination d’un chef spirituel ne doit pas être motivée uniquement par son irréprochabilité (même si elle reste capitale), mais aussi par son esprit et sa volonté à se donner pour ceux qu’il est amené à diriger.
Malheureusement, nous déplorons de notre époque la nomination (souvent motivée par de multiples intérêts) de dirigeants spirituels dont le seul souci est de savoir combien de personnes vont se lever devant eux lors de leur passage ou de leur montée à la Torah !!!!
Qui plus est, les fonctions et l’autorité de ces gens seraient remises en question même par Kora’h lui-même puisque selon son calcul, il faut être totalement irréprochable pour diriger le peuple, ce qui est loin d’être le cas de beaucoup de nos chers « dirigeants spirituels » tous aussi impliqués dans des conflits d’intérêts les uns que les autres, et qui ont une certaine facilité à mettre entre parenthèses certains paragraphes du Shoul’han ‘Arou’h dès lors qu’il s’agit de pouvoir et d’argent !!!!
Mieux encore !
Dans certaines grandes villes de France, certains « Dayanim » n’hésitent pas à faire preuve de véritable tyrannie pour affermir leur pouvoir, en proférant des propos des plus odieux à l’égard de pauvres membres de leur communauté qui ont le malheur d’oser vouloir en savoir plus sur certaines choses, de vouloir tout simplement apprendre une Torah que ces « Grands Rabbanim » ne sont pas en mesure de leur transmettre, mais ne sont pas non plus disposés à avouer une telle faiblesse !!
Que dire de la Casherout qui n’est souvent certifiée que par le niveau relationnel entre le commerçant et le « Dayan » !! (Quand ce n’est pas par le montant du chèque adressé non pas au profit de l’organisme de Casherout, mais au profit du « Dayan » lui-même pour financer ses propres réjouissances familiales !!!)
De pauvres gens naïfs se laissent véritablement extorquer leur argent (au sens propre du terme et le mot reste faible) par des gens qui portent des barbes et des chapeaux et qui doivent être pris au sérieux simplement parce qu’ils occupent des fonctions officielles, et qui font croire toutes sortes d’absurdités en échange de quelques billets que l’on doit vite offrir à tel ou tel envoyé d’un établissement de Torah, de passage pour collecter des fonds, et cette argent assurera la « réussite » au pauvre naïf qui ne réussira finalement qu’à se faire berner par le mensonge de gens sans scrupules mais qui occupent des fonctions officielles pour – en réalité - servir seulement leurs propres intérêts !!
Comment ce fait-il qu’il est impossible de voir la Semi’ha (diplôme) d’un Dayan en poste depuis environ 15 ans ?!!
Comment peut-on lui confier la prononciation de divorces religieux, de conversions, de certifications de Casherout, ou tout simplement des questions d’ordres Hala’hiques des plus complexes qui requièrent un certificat émanant d’une autorité Hala’hique officielle, alors qu’il a toujours refusé de produire les documents officiels qui lui confèrent toutes ces aptitudes ?!
Comment se fait-il que les conversions – qui font naturellement parties des prérogatives d’un Dayan – sont « confiées » (pour certains dossiers) à une personne duquel les employeurs du Dayan n’ont jamais entendu parler, au moins sur le plan officiel ?!
Qui plus est, cet « assistant » en retire un excellent moyen de subsistance puisqu’il n’hésite pas à facturer 20 € chaque séance d’une vingtaine de minutes pendant laquelle il reçoit le candidat à la conversion, et où il se contente de lui poser quelques questions sur sa progression dans l’apprentissage du judaïsme, alors que d’autres personnes font le véritable travail par des enseignements très approfondis, en formant concrètement des gens qui deviendront par la suite de vrais juifs pratiquants avec de solides acquis, et ces gens n’ont pourtant jamais réclamer quoi que ce soit en échange d’un travail digne de ce nom !!
Et tout ceci est totalement ignoré des employeurs du Dayan.
La conversion est certes un domaine extrêmement délicat qui requiert – au-delà des compétences Hala’hiques – une forte intuition afin d’établir de façon formelle la sincérité de la personne désirant se convertir.
Mais un Dayan doit aussi rechercher la vérité et la justice.
Pourquoi se laisse t-il – systématiquement et de façon très ferme – influencer par la moindre rumeur (dont la source est presque toujours une personne ayant de l’animosité envers le candidat) qui pourrait remettre en question la sincérité d’un candidat en conversion, et décide t-il immédiatement de stopper le dossier compromis, sans prendre soin de vérifier les faits auprès de gens dont l’objectivité est indéniable ? Combien de rumeurs courent-elles au sujet du Dayan lui-même, et pourtant personne n’envisage sa disqualification !!!!! (Malheureusement ?)
Une ville entière reste privée de la consommation de certains aliments sous prétexte que le niveau de Casherout de cette ville est plus exigeant qu’ailleurs, alors que des organismes de Casherout réputés pour leur rigueur et leur intransigeance au niveau Hala’hique autorisent ces mêmes aliments.
N’est-il pas plutôt question de faiblesse et d’incompétence plutôt que d’exigence Hala’hique ?!
Des questions Hala’hiques de sujets identiques sont régulièrement posées au « Dayan » et reçoivent pourtant des réponses différentes : on permet à l’un ce que l’on interdit à l’autre.
Chacun a des ennemis et nul n’est irréprochable, mais il n’existent pas beaucoup d’individus qui n’ont que des ennemis !!!! (Les quelques autres sont soit des idiots, soit des hypocrites !!)
Kora’h avait réellement tort.
Le véritable dirigeant c’est celui qui œuvre pour sa communauté, et non pas celui qui attend constamment que celle-ci œuvre pour lui !!!!
3. Les religieux au pouvoir
Est-ce donc peu, pour vous, que le D. d'Israël vous ait distingués de la communauté d'Israël, en vous admettant auprès de lui pour faire le service du Mishkan (le Temple provisoire du désert) d’Hashem, et en vous plaçant en présence de la communauté pour la servir?
Il t'a donc approché de lui, toi et tous tes frères, les enfants de Lévi, et vous réclamez encore la Kehouna (la prêtrise) ! » (Bamidbar chap.16 verset 9 et 10)
A travers ces versets, nous voyons de quelle façon Moshé Rabbenou réprimande Kora’h et ses compagnons.
Cependant, une question est posée par le Gaon Rabbi Yehouda Tsadka z.ts.l, (Rosh Yeshiva de Porat Yossef à Jérusalem, décédé en 1991) dans son livre Kol Yehouda :
N’est il pas naturel que celui qui possède 100, désire 200 ?!
Moshé Rabbenou est en train de reprocher à Kora’h et à son assemblée, d’avoir l’un des réflexes qui caractérisent le plus l’être humain : L’AMBITION.
Si Kora’h n’était jusqu’à présent qu’un Levi qui travail dans le Mishkan, comme tous les membres da sa tribu, qu’y a-t-il d’illégitime à désirer d’avantage ?
Le Ktav Sofer (Rabbi Avraham Shmouel Binyamin SOFER, fils du ‘Hatam Sofer Tchecoslovaquie 19ème siècle) répond à cette question en disant que tout d’abord, il est nécessaire de comprendre leurs réclamations contre Moshé Rabbenou.
Puisqu’ils réclament la Kehouna, et cela malgré qu’ils prétendent aussi que toute l’assemblée est sainte, c’est qu’ils reconnaissent qu’il faut un dirigeant ?!
Qu’est ce que cela peut-il changer que ce soit Moshé ou un autre ?!
En vérité, leur véritable reproche envers Moshé Rabbenou est le suivant :
« Comment pouvez vous diriger le peuple, toi Moshé, ainsi que ton frère Aharon, alors que vous n’avez pas subits l’esclavage en Egypte ?!!!!
Vous n’êtes donc pas aptes à diriger un peuple qui a tellement souffert, vous qui n’avez connus aucunes souffrances !!!
Un vrai dirigeant, c’est quelqu’un qui a traversé les souffrances du peuple qu’il dirige !!»
Et à cela, Moshé Rabbenou répond le contenu de nos deux versets du début :
« Est-ce donc peu, pour vous, que le Dieu d'Israël vous ait distingués de la communauté d'Israël, en vous admettant auprès de lui pour faire le service du Mishkan d’Hashem, et en vous plaçant en présence de la communauté pour la servir?
Il t'a donc approché de lui, toi et tous tes frères, les enfants de Lévi, et vous réclamez encore la Kehouna ! »
En clair :
Toi aussi Kora’h, tu es de la tribu de Levi, qui - comme nous le savons - n’a pas du tout pris part à l’esclavage d’Egypte (grâce au fait qu’ils ne sont pas tombés dans le piège de Pharaon), et pourtant, Hashem vous a admis dans son Mishkan, et vous trouvez encore juste de réclamer la Kehouna !
Nous sommes ici face à un débat encore d’actualité :
Qui est apte à gérer le peuple ?
Est-ce uniquement celui qui a connu les souffrances que le peuple a subit, ou bien ce n’est pas un critère qui détermine forcément l’aptitude à diriger ?
Nous constatons que les personnes qui pensent comme Kora’h (et il y en a encore beaucoup de notre époque !!), considèrent qu’un juif orthodoxe, érudit dans la Torah, ne peut pas être un dirigeant de notre société, et non pas pour des raisons de pratiques religieuses, mais tous simplement parce que ce type d’individu n’a pas le même parcours, ni le même vécu, que les gens du peuple.
Mais nous pouvons également constater que la vision qu’Hashem a de la chose, est complètement différente. Le fait que Moshé et Aharon n’aient pas subits l’esclavage d’Egypte, n’en fait pas pour autant des personnes inaptes à diriger un peuple qui lui, a souffert de cet esclavage.
Il y a les critères de jugement qui sont ceux de gens comme Kora’h et son espèce, mais il y a aussi les critères de jugement qui sont ceux d’Hashem et de la Torah !!
Un verset de Tehilim fait allusion à cette révolte de Kora’h :
« Ils ont jalousé Moshé dans le camp, ainsi qu’Aharon, le saint d’Hashem » (Tehilim 106)
On peut interpréter ce verset ainsi :
Moshé et Aharon sont, dans ce verset, des personnages représentant le juif pratiquant, sous deux aspects de la vie :
Moshé Rabbenou qui étudiait la Torah en permanence sous sa tante qui se trouvait à l’extérieur du camp – on lui reproche de ne pas être assez mêlé à la vie active au sein du camp.
On a toujours reproché aux juifs orthodoxes de trop vivre dans leur propre monde, sans se soucier de la société.
Puis, c’est à Aharon, le « saint » d’Hashem, qui l’on reproche des choses. Lui qui a passé toute sa vie mêlé à la société, à toujours essayer de rétablir des relations entre gens fâchés, ou entre maris et femmes …
A lui, on lui reproche de trop s’occuper de la société, et on lui conseille de retourner à sa place, au milieu de ses livres « saints » !!
Quelque soient les choix d’un juif pratiquant, qu’il essaye d’oeuvrer pour la société, ou qu’il ne se soucie que de son élévation spirituelle, il trouvera toujours des Kora’h, des Datan ou des Aviram, pour le montrer du doigt !!!
Shabbat Shalom
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