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le Rav Ovadia YOSSEF Shalita.

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lundi 13 juillet 2009

Les ‘Houmrot

Les ‘Houmrot

Rappel :
le terme « ‘Houmra » désigne tout geste ou comportement rigoureux et restrictif que l’on désire s’imposer, malgré sa totale autorisation par la Hala’ha et l’ensemble des décisionnaires. (Pour plus de clarté, nous vous conseillons de lire aussi les « Sources et Développements »)

QUESTION

Est-ce que chacun est autorisé à s’imposer les ‘Houmrot (rigueurs) qu’il désire ?

DECISIONS DE LA HALA’HA

La ‘Houmra ne doit pas être simplement calquée, imitée, « singée » à partir du comportement de Grands Rabbanim, sans se soucier si l’on est réellement au niveau de ce comportement rigoureux, ou bien si l’on est encore bien éloigné d’une telle rigueur.

Lorsqu’une personne s’impose une ‘Houmra qui ne lui apportera aucun enseignement ni aucune morale particulière, cette personne est qualifiable de sotte.

Mais pour ce qui est des Mitsvot vis-à-vis du prochain, nous devons au contraire nous imposer toutes les rigueurs et restrictions possibles.

Il est à noter que de nos jours nous voyons des individus qui passent pour être des gens non seulement pratiquants, mais qui s’imposent la moindre ‘Houmra qu’ils entendent. Pour ces personnes, la crédibilité religieuse ne peut se prouver que par un comportement continuellement restrictif et rigoureux (alors qu’un tel comportement est souvent le signe de la pire des ignorances !!).
Pourtant, ces mêmes personnes - si strictes et si rigoureuses dans leur judaïsme - ne sont pas capables de faire preuve du moindre Der’eh Erets (savoir vivre) !
Ce sont ces mêmes personnes qui resteront des années sans adresser la parole à leur propre frère ou père !!
Ce sont ces mêmes personnes qui ne seront pas capables de vous dire « Bonjour » ou « Merci », ou même de vous tenir une porte !!!

En public, il est évident qu’un comportement rigoureux là où la Hala’ha ne le demande pas, peut être interprété comme un signe de prétention. Mais dans l’intimité (ou la discrétion), il est tout à fait concevable de s’imposer la rigueur même si la Hala’ha ne l’exige pas.

Nous reconnaissons là un autre problème de notre époque : La crédibilité.
En effet, de nombreux Ba’alé Teshouva s’imposent toutes sortes de ‘Houmrot, pensant généralement que ces ‘Houmrot sont le reflet du strict Din (alors qu’il n’en est rien !!). Ces personnes réalisent leurs ‘Houmrot même aux yeux de ceux qui les ont connus dans leur passé avant leur Teshouva, et ces Ba’alé Teshouva ne se rendent pas compte qu’ils font l’objet de la moquerie des autres qui n’arrivent pas à assimiler de tels changements si radicaux.

Cependant (même si cela fait aussi l’objet d’une discussion parmi les décisionnaires), si l’on constate que l’on s’est heurté une fois à un interdit, on est autorisé à s’imposer la rigueur nécessaire pour s’éloigner de cet interdit.

Pour résumer :
La ‘Houmra est personnelle. Elle ne doit être adoptée qu’après avoir acquis la connaissance et la certitude que la chose que l’on veut s’interdire ou s’imposer est – du point de vue du Din - totalement permise. La ‘Houmra ne doit avoir comme seule et unique vocation la protection de la personne dans un domaine qui lui est sensible, ainsi que son élévation spirituelle.

SOURCES ET DEVELOPPEMENTS

Dans les Hala’hot relatives à la viande et au lait, nous avons déjà eu l’occasion de mentionner qu’il faut attendre 6 heures entre la consommation de la viande et celle du fromage et des produits laitiers, puisque telle est l’opinion de MARAN l’auteur du Shoul’han ‘Arou’h (Y.D 89).
Nous avons également précisé que cette obligation prend sa source dans la Guemara ‘Houlin (105a).

Pour répondre à notre question d’aujourd’hui, nous allons citer les propos de la Guemara concernant l’attente entre la viande et le lait :
Mar ‘Oukva dit : « Concernant l’attente entre la viande et le lait, je suis comparable à du vinaigre vis-à-vis du vin (c’est l’expression qu’emploie un fils lorsqu’il n’est pas d’un niveau aussi élevé que celui de son père), car lorsque mon père consommait de la viande, il ne mangeait du fromage que 24 heures plus tard. Alors que moi je me contente d’attendre ce qu’exige le strict Din c'est-à-dire le prochain repas (6 heures plus tard). »

Les commentateurs demandent :
Pourquoi Mar ‘Oukva – qui était réputé pour être un homme ‘Hassid (d’un très haut niveau de piété) et un homme saint – se qualifie-t-il de « vinaigre fils du vin » pour une chose aussi insignifiante pour un homme de son niveau spirituel ? Ne pouvait-il pas imiter son père et s’imposer lui aussi d’attendre 24 heures pour manger du fromage après la viande ?

Notre maître le ‘HYDA écrit dans son livre ‘Arvé Na’hal (Parashat ‘Ekev) que le fait que Mar ‘Oukva ne s’était pas imposé cette rigueur comme son père s’explique par l’enseignement de nos maîtres dans la Guemara Bera’Hot (16b) : « N’est pas autorisé à revendiquer le renom qui le désire. ».
Ce qui signifie que l’on ne doit pas « singer » des gestes religieux que l’on remarque simplement chez des grands Rabbanim sans se soucier si on est réellement au niveau de ce comportement rigoureux ou si l’on est encore bien éloigné d’une telle rigueur.

Il est vrai qu’il est aussi enseigné dans le Talmud Yeroushalmi (Bera’hot fin du 2ème chap.) :
Celui qui est exempt d’une chose et qu’il se l’impose malgré tout est qualifiable de sotte.

Mais le Gaon auteur de la Shita Mekoubetsete (sur Bava Kama 87a) explique qu’il s’agit là d’une situation dans laquelle une personne s’impose une restriction ou une obligation qui n’est absolument pas réclamée par la Torah, mais qui de plus, n’apportera à la personne aucun enseignement ni aucune morale particulière.

Notre maître le ‘HYDA – dans son livre ‘Aïn Zo’her (sect. « Pé » note 13) – explique que cet enseignement concerne les Mitsvot vis-à-vis d’Hashem. Mais pour ce qui est des Mitsvot vis-à-vis du prochain, nous devons au contraire nous imposer toutes les rigueurs et restrictions possibles.

Il est à noter que de nos jours nous voyons des individus qui passent pour être des gens non seulement pratiquants, mais qui s’imposent la moindre ‘Houmra qu’ils entendent. Pour ces personnes, la crédibilité religieuse ne peut se prouver que par un comportement continuellement restrictif et rigoureux (alors qu’un tel comportement est souvent le signe de la pire des ignorances !!).
Pourtant, ces mêmes personnes - si strictes et si rigoureuses dans leur judaïsme - ne sont pas capables de faire preuve du moindre Der’eh Erets (savoir vivre) !
Ce sont ces mêmes personnes qui resteront des années sans adresser la parole à leur propre frère ou père !!
Ce sont ces mêmes personnes qui ne seront pas capables de vous dire « Bonjour » ou « Merci », ou même de vous tenir une porte !!!

Le Gaon auteur du Shou’t Shevout Ya’akov (tome 2 chap.44) explique que parfois nos maîtres émettent une critique à l’encontre de celui qui s’impose des ‘Houmrot – comme à travers l’enseignement du Talmud Yeroushalmi cité plus haut – et parfois ils vantent ses mérites, comme à travers l’expression courante : « Celui qui s’impose la ‘Houmra mérite la Bénédiction » (ou bien « son souvenir est bon »).
En réalité, lorsqu’il s’agit d’une situation en public, il est évident qu’un comportement rigoureux là où la Hala’ha ne le demande pas, peut être interprété comme un signe de prétention. Mais s’il s’agit d’une situation où la personne se trouve seule dans son intimité, elle est tout à fait autorisée à s’imposer la rigueur même si la Hala’ha ne lui exige pas, et c’est là qu’elle mérite la Bénédiction.

Encore une fois, nous reconnaissons là un autre problème de notre époque :
La crédibilité.
En effet, de nombreux Ba’alé Teshouva s’imposent toute sorte de ‘Houmrot, pensant généralement que ces ‘Houmrot sont le reflet du strict Din (alors qu’il n’en est rien !!). Ces personnes réalisent leurs ‘Houmrot même aux yeux de ceux qui les ont connus dans leur passé avant leur Teshouva, et ces Ba’alé Teshouva ne se rendent pas compte qu’ils font l’objet de la moquerie des autres qui n’arrivent pas à assimiler de tels changements si radicaux.

Le RAMA écrit dans l’une de ses Tshouvot (chap.54) adressée à un ‘Ha’ham qui désirait s’imposer une ‘Houmra (rigueur) sur une chose qui constituait une totale autorisation selon la Hala’ha, et le RAMA lui répondit qu’il n’était pas autorisé selon le Din à s’imposer des ‘Houmrot.
En effet, le Talmud Yeroushalmi (Nedarim) enseigne :
« Il t’est suffisant d’observer les interdits que la Torah t’a déjà imposés sans pour encore aller t’en imposer davantage. »

Cependant, si l’on constate que l’on s’est heurté une fois à un interdit, on est autorisé à s’imposer la rigueur nécessaire pour s’éloigner de cet interdit, comme il est rapporté dans une Tshouva du MAHARAM de ROTTENBOURG (chap.615 et citée par le Morde’hi sur ‘Houlin début du chap. « Kol Ha-Bassar ») qui se moquait de ceux qui s’imposent la rigueur de ne pas manger de viande après le fromage (ce qui n’est pas exigé par le Din, car il n’y a que pour la viande qu’il faut attendre 6 heures pour manger du fromage, mais après le fromage, il n’y a aucune réelle obligation d’attendre et il est suffisant de se rincer la bouche et de se laver les mains), et au contraire, il lui semblait même que cet usage contredit totalement la Torah, puisque cette rigueur n’a aucune source dans le Talmud.
Mais un jour, le MAHARAM de ROTTENBOURG prit un repas de viande dans une auberge Casher, et trouva du fromage entre ses dents après son repas, et depuis ce jour il s’imposa d’attendre après le fromage le même délai que l’on doit attendre après la viande. Il termine ses propos en disant qu’un tel comportement rigoureux ne représente ni une contestation du Talmud, ni un ajout sur les paroles de la Torah, car chacun est libre de s’imposer les ‘Houmrot qu’il désire afin de se protéger de l’interdit.

Mais là encore les décisionnaires débattent :

Selon le MAHARSHAL (cité par le Sha’h sur Y.D 89 note 17) et le Teroumat Ha-Deshen (cité par le Gaon auteur du livre Min’hat Ya’akov dans son livre Solete Min’ha – règle 76 Din 2 - au nom du Torat Ha-Asham), c’est uniquement lorsqu’on s’est heurté à un interdit que l’on est autorisé à s’imposer la ‘Houmra nécessaire pour se protéger ans l’avenir de cet interdit, à l’instar du MAHARAM de ROTTENBOURG. Mais sans cela, toute personne qui s’impose une ‘Houmra alors que la Hala’ha ne lui exige pas, es qualifiable de MIN (hérétique) car – d’une certaine façon - il innove un interdit.

Cependant, le Sha’h (référence citée plus haut), après avoir rapporté les propos du MAHARSHAL, les réfute totalement et tranche que l’on est autorisé à s’imposer une ‘Houmra pour se protéger d’un interdit, même sans avoir été confronté à cet interdit.

Il semble que telle est également l’opinion du ISSOUR VE-HETER (règle 57).

Il y a plus de 10 ans, notre maître le Rav Ovadia YOSSEF Shalita s’adressa aux étudiants du Kollel Ye’havé Da’at de Jérusalem en leur disant qu’il est bon pour un Ben Torah de s’ajouter des ‘Houmrot selon ses possibilités, afin de craindre et de prendre en considération les opinions des décisionnaires qui interdisent certaines choses, même si la Hala’ha n’a pourtant pas été fixée selon leur opinion et autorise ces choses par opposition à leurs avis.

Pour résumer :
La ‘Houmra est personnelle.
Elle ne doit être adoptée qu’après avoir acquis la connaissance et la certitude que la chose que l’on veut s’interdire ou s’imposer est – du point de vue du Din - totalement permise.
La ‘Houmra ne doit avoir comme seule et unique vocation la protection de la personne dans un domaine qui lui est sensible, ainsi que son élévation spirituelle.

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